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JOURNALISTE HOMOPHOBE ET PYROMANE

Dans les mois qui précèdent la première guerre mondiale 14-18, l’Empereur Guillaume II était loin d’encourager une solution militaire qui lui fut finalement imposée par une déstabilisation médiatique homophobe orchestrée par polémiste Maximilian Harden au sujet duquel, l’écrivain autrichien Stefan Zweig écrira : « Harden, jeté dans la politique par Bismark en personne, qui se servait volontiers de lui comme d’un porte voix ou d’un paratonnerre, renversait des ministres, faisait exploser l’affaire Eulenburg, faisait trembler le palais impérial, qui redoutait chaque semaine de nouvelles attaques, de nouvelles révélations. » L’Empereur Guillaume II fréquentait beaucoup les membres du « cercle de Liebenberg » issus de la haute noblesse prussienne, nationaliste et ultraconservatrice dont une grande partie étaient homosexuels. Le Prince, devenu Evêque, Alexandre de Hohenlohe évoque même une homosexualité pour le moins latente de l’empereur : « Pour pouvoir sonder l’abime qui s’ouvre dans cet homme, il faudrait posséder la plume d’un Marcel Proust ; il faudrait descendre dans les profondeurs et les souterrains de certaines natures anormales et pouvoir les peindre comme l’a fait cet auteur dans son œuvre «  À la recherche du temps perdu », lorsqu’il a décrit les différents genres d’inversion et les multiples variétés d’invertis des deux sexes»

Après que le Kaizer Guillaume II ait renvoyé le chancelier Bismarck en 1890, la realpolitik du chancelier de fer céda la place à une politique consensuelle inspirée du « cercle de Liebenberg » – qualifié de « parti de la paix » – inspiré par le Prince Philipp d’Eulenburg favorable à un rapprochement avec la France. Guillaume II se lia d’une profonde amitié qui conféra à Eulenburg une grande influence au point qu’il fit nommer un membre du « cercle de Liebenberg », Bernhard von Bülow comme chancelier.

Le polémiste Maximilian Harden – une sorte de Zemmour avant l’heure – prit alors Eulenburg pour cible en propageant l’idée, dans sa revue Die Zukunft (l’avenir), que l’Allemagne était dirigée par des « invertis malades et dégénérés ». Ses propos se feront de plus en plus précis au point qu’il déclencha un énorme scandale qui aboutit à destituer Eulenburg et ses amis pacifistes, ouvrant ainsi une voie royale aux partisans d’un conflit armé contre la France sous la férule d’un Bismarck revanchard qui éclipsa l’Empereur lui-même dès que le conflit dégénéra.

Il s’ensuivit un désastre : une guerre dont le bilan s’établira à 10 millions de morts et plus de 20 millions de blessés. Et surtout sera le prélude à une soif de revanche qui débouchera sur l’ascension d’Hitler et, par corrélation un autre désastre encore plus important qui coûtera la vie à plus de 75 millions de morts. Quant aux blessés, on en sait trop rien, tant ils sont nombreux…

Ces guerres auraient-elles pu être évitées si l’homosexualité en Allemagne avait été légalisée ? Toujours est-il que si l’article 175 qui rendait les rapports des hommes entre eux condamnables n’avait pas existé, le « parti de la paix » qui avait l’oreille de l’Empereur aurait permis un rapprochement avec la France qui aurait pu éviter le déclenchement de la guerre de 14-18.

Après la deuxième guerre mondiale, les actes homosexuels feront encore en Allemagne de l’Ouest l’objet de persécutions et de condamnations. Le 10 mai 1957, la Cour constitutionnelle statue que « l’activité homosexuelle viole clairement les us et coutumes du pays. Ainsi, les homosexuels ne peuvent pas se référer au droit garanti par la loi constitutionnelle sur le développement libre de la personnalité […] ». L’homosexualité est qualifiée de « comportement sexuel débridé » pour les hommes et reste plus indulgente envers les femmes homosexuelles.

Entre les années 1950 et 1994, 50 000 homosexuels sont emmenés devant les tribunaux de la RFA en vertu du « paragraphe 175 » non abrogé et plus de 100 000 procédures d’enquête ont été ouvertes. Les rapports sexuels entre hommes sont dépénalisés et légalisés en 1969 et la majorité sexuelle fixée à 21 ans, puis 18 ans en 1973. Malgré cette dépénalisation, la collecte policière de données relatives aux personnes homosexuelles se poursuit avec la tenue de listes roses. Le manuel de criminologie voit encore en 1978, la tenue de fiches pour motif d’homosexualité comme étant nécessaire dans les tâches de protection policière à exécuter.

En 1994, le Bundestag proclame l’abrogation du « paragraphe 175 » et la majorité sexuelle passe de 14 (dans les nouveaux Länder allemands) à 16 ans, dans le cadre du processus de réalignement juridique s’opérant suite à la réunification allemande de 1990. La fin des années 1990, voit porter en Allemagne, la revendication en faveur d’une reconnaissance sociale pour les couples de même sexe débouchant en février 2001 sur la création d’un partenariat enregistré.

En mars 2017, les 50 000 personnes poursuivies pour homosexualité sous la RFA sont réhabilitées par décision du conseil des ministres. Le texte prévoit l’annulation des condamnations prononcées et des indemnisations. Le ministre de la Justice Heiko Maas a également annoncé un financement de 500 000 euros pour une fondation chargée du travail de mémoire.

Pendant ce temps Poutine lance une campagne anti-gay féroce en légalisant un texte homophobe qui marque un retour aux valeurs traditionnelles digne de l’Inquisition au Moyen âge. Une mesure destinée à s’attacher les faveurs de l’Eglise orthodoxe dans son emprise sur une Russie confisquée par un pouvoir oligarchique.

Comme ce fut le cas à la Renaissance, lorsque Savonarole chassa Laurent le magnifique accusé d’avoir perverti Florence, le « Tsar » russe reprend cette formule en accusant l’Occident de ne pas respecter les principes fondamentaux de l’Eglise. Ouvrant du même coup, une Inquisition moderne à l’encontre de la communauté LGBT.

Une brèche dans laquelle s’infiltre sans sourciller son affidé tchétchène Ranzam Kadyrov qui ordonne, sans sourciller, d’emprisonner, de torturer et de massacrer les homosexuels de son pays. Un retour aux sources inquiétant qui réjouit les nationalistes, les religieux fanatiques de tous bords ou autres adorateurs d’Hitler qui lui aussi dans les années 30, envoyaient ces homosexuels en camp de concentration. Un rappel mortifère qui laisse penser que nos libertés fondamentales sont plus que jamais en péril.

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