fr

L’HOMOSEXUALITÉ EN ALLEMAGE

Friedrich Schmehling avait 15 ans lorsqu’il a passé quelques semaines dans une prison pour mineurs à la fin des années 50. A cause de son homosexualité. Friedriech Schmehling, 74 ans aujourd’hui, est l’une de ces nombreuses victimes du paragraphe 175, l’article du Code pénal qui – abrogé en 1994 seulement — a semé pendant des décennies la terreur chez les homosexuels allemands de la jeune RFA.

Le 21 mars 2017, le ministre de la Justice, le social-démocrate Heiko Maas, a présenté un projet de réhabilitation qui doit être adopté in extremis avant la fin de la législature par le Bundestag. L’article 175, adopté en 1872, condamne à des peines de prison les hommes «coupables de relations sexuelles contre nature», c’est-à-dire «avec d’autres hommes» ou «des animaux». L’homosexualité féminine, jugée moins «dangereuse», n’a jamais été réprimée par la loi en Allemagne.

Avec l’arrivée des nazis au pouvoir, l’article 175 se durcit en 1935. Les homosexuels risquent alors une peine de travaux forcés. 42 000 hommes sont condamnés sous le nazisme pour homosexualité. 10 000 à 15 000 sont envoyés dans les camps de concentration. La majorité d’entre eux y meurent de mauvais traitements et de privations. Pourtant la guerre finie, l’article 175 reste en vigueur pendant des décennies comme la seule survivance légale des persécutions nazies. 50 000 hommes sont de nouveau condamnés dans les années 1950 et 1960, pour certains à de la prison. En RDA, plus libérale sur le plan des mœurs, l’article 175 est abrogé dès 1967.

Friedrich Schmehling se souvient d’un amant d’un soir à Hambourg, condamné à 7 ans et demi d’incarcération, et qu’il ne reverra jamais. «On avait un pied dans une pissotière, l’autre en prison», se souvient-il dans les colonnes du magazine gay Siegesäule.

Rudolf se souvient qu’il avait presque 30 ans lorsqu’il n’a plus eu à craindre la police des mœurs. A partir des années 1970, les procès pour homosexualité se sont raréfiés : « Mais notre vie ne s’est pas normalisée pour autant. Pendant de longues années, il a encore fallu se cacher de son employeur ou de son propriétaire».

De nombreuses carrières, notamment dans l’administration, sont restées fermées aux homosexuels condamnés. Les activistes gays rappellent qu’en 1963 les philosophes Adorno et Horckheimer ont pu écarter d’une chaire universitaire convoitée l’historien Golo Mann, le fils de Thomas Mann, à l’aide d’un courrier rappelant l’homosexualité du candidat, et «les risques que cela représenterait pour la jeunesse.»

Cela fait plus de 20 ans que les activistes militent pour une réhabilitation des victimes du paragraphe 175 et Heiko Maas a dû batailler ferme avec son partenaire de coalition bavarois, la très conservatrice CSU, pour faire adopter son projet de réhabilitation. «Nous ne pourrons jamais supprimer les abjections commises au nom de l’Etat de droit, mais nous voulons réhabiliter les victimes», a promis le ministre. Le texte prévoit l’annulation des condamnations, et l’indemnisation des hommes concernés. Le gouvernement débloquera également une enveloppe de 500 000 euros pour an à une fondation spécialisée dans le travail de mémoire sur le sujet.

Source :www.liberation.fr

Consulter également

L’ENFER DES PRISONS ÉGYPTIENNES POUR LES DÉTENUS GAYS ET TRANS

Derrière les murs des prisons égyptiennes, l’humanité des personnes LGBT est bafouée. Elles sont victimes …

MARADONA FACE À KADYROV, EXÉCUTEUR DES GAYS TCHÉTCHÈNES

GÉNOCIDE LGBT AUX FRONTIÈRES DE L’EUROPE Sous le prétexte de revendications de la communauté LGBT russe pour …